Ie sonne la retraitte D'amour qui mal me traitte, Retirez vous amour, il est en heure: Vostre pointure dure, Patiemment i'endure, Puis que la vie entiere me demeure. Qui de pres poursuyuie M'aloit estre rauie, Sans en auoir aucune aperceuance: Lors qu'une voix m'esueille, Et me dit en l'oreille, Fuyez amour, rempli de deceuance. A donc en moy ie pense, Est-ce la recompense Qu'amour sçait faire aus amants qui le seruent: Si d'aucuns le merite, Grace, & bien ne merite, Aumoins la mort, en seruant, ne deseruent. Qui ouyt iamais dire, Que mort, peine & martyre, Aus seruiteurs on donnast pour salaire: Or puis que le seruice On punist comme vice, Autant nous doit ennuyer, & desplaire. Ainsi pourray-ie viure, De passion deliure, Ainsi seray-ie en ma seule puissance: Ainsi sans que grand peine Amour au cœur m'ameine, De luy mesme i'auray la iouyssance. |
Heureus donc qui peult estre De soy vainqueur, & maistre, Et qui ne met son cœur en seruitute: Qui prent de seruir, aime Vn autre que soy-mesme, Esclaue & malheureus, ie le repute. Combien que la conqueste D'une maistresse honneste, D'un gentil cœur, la volonté contente: Toutesfois à luy faire Plaisir, elle differe, Se complaignant, maudira son attente. Disant, combien m'est chere Vn peu de bonne chere, Aura le cœur remply d'impatience: Donc qu'un chacun maudie D'amour la maladie Et d'en sortir, aprenne la science. S'il me vient auantage, Pour faire bon visage, Ie ne dy que les yeus n'affectionne: Mais s'amour au cœur tire, Soudain ie me retire, De peur que mon las cœur ne passionne. |
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