Ie ne suis moins aimable Pour ne vouloir aimer, Car ie suis veritable, Qui est à estimer. Le plaisir que l'on ha d'un seruiteur, Ne sçauroit plus entrer dedans mon cœur. Si faut que toute femme Amour doiue sentir, Heureuse tiens ma flamme, Sans point m'en repentir: Helas il m'asseuroit, qu'un plus grand bien Ne pourroit esperer, que d'estre mien. Car i'ay esté laissée D'un que ie pensoye seur, Par trop m'estre auancée, I'ay retardé mon heur: Mais rien ie n'aimerai, que mon deuoir, Pour tousiours auec moy honneur auoir. Ce qui plus me tourmente, C'est qu'il me faut celer Le bien qui me contente, Et le dissimuler: Fermant tousiours les yeux, de peur de voir Celuy qui en aimant fait son deuoir. |
Ie fu si bien seruie En mon aduenement, Que ie suis esbahie D'ou vient ce changement: I'ai trop congneu des hommes l'affliction, Pour souffrir d'un trompeur la fiction. Seroit elle moins belle Pour me vouloir aimer, Et aussi si cruelle Que rien ne m'estimer: Lon congnoist à mes yeux la fiction, Et sent dedans mon cœur la passion. Plus il me faict congnoistre Qu'il est sans fiction, Moins ie luy veux permettre M'aimer d'affection: Mais i'ay peur qu'à la fin mon poure cœur Ne puisse de l'amour estre vaincueur. Mais maudit soit la place Ou me feistes sçauoir, Rien que ma bonne grace Ne desiriez auoir: O malheureux, muable plus que vent ! Gardez vous de parler doresnauant. |
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