[ Downloads ]   [ Home ]

 

Adrian le Roy

SECOND LIVRE DE GVITERRE

1555

 

5. O combien est heureuse.

O combien est heureuse
La peine de celer
Vne flamme amoureuse,
Qui deux cœurs fait brusler,
Quand chacun d'eux s'attend
D'estre bientost content.

Làs on veult que ie taise
Mon apparent desir,
En saignant qu'il me plaise
Nouuel amy choisir:
Mais telle fiction
Veult mesme affection.

Vostre amour froide & lente
Vous rend ainsi discret:
La mienne violente
N'entend pas ce secret:
Amour nulle saison
N'est amy de raison.

Si mon feu sans fumée
Est euident & chauld,
Estant de vous aimée,
Du reste ne m'enchaut:
Soit mon mal veu de tous,
Et seul senty de vous.








Si femme en ma presence
Autre vous entretient,
Amour veult que ie pense,
Que cela m'appartient:
Car luy & longue foi
Vous doiuent tout à moi.

Que me sert que ie soye
Auec Princes, ou Roy,
Et qu'ailleurs ie vous voye
Sans approcher de moy ?
La peur du changement
Me cause grand tourment.

Quand par bonne fortune
Serez mien à tout poinct,
Lors parlez à chacune,
Ie ne m'en plandrai point:
Bien vous pry ce pendant
N'estre ailleurs pretendant.








Helas qu'il fust possible
Que puisses estre moy,
Pour voir s'il m'est penible
Le mal que i'ay pour toy:
Tu prendrois grand pitié
De ma ferme amytié.

Vous seble-il, que la veue
Soit assez entre amis,
Ne me voyant pourueue
De ce qu'on m'ha promis ?
C'est trop peu que des yeux,
Amour veult auoir mieux.

De vous seul ie confesse
Que mon cœur est transsi:
Si i'estoye grand' princesse,
Ie diroye tout ainsi:
Si le vostre ainsi fait,
Monstrez le par effect.

Close

Online text copyright ©, Harald Lillmeyer
www.harald-lillmeyer.kulturserver.de