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Adrian le Roy

SECOND LIVRE DE GVITERRE

1555

 

3. Puis que viure en seruitute.

Pvis que viure en seruitute
Ie deuoye triste & dolent,
Bien heureux ie me repute
D'estre en lieu si excellent:
Mon mal est bien violent,
Mais amour l'ordonne ainsi,
Vueillez en auoir merci.

Vostre beauté sans pareille
Ne doit prendre à deplaisir,
S'a l'aimer ie m'appareille,
Car on ne peult mieux choisir:
Si i'ay par trop de desir,
I'ay beaucoup de foy aussi,
Vueillez en auoir merci.

Autre bien ne veux pretendre
Pour mes plaintes & clameurs,
Sinon que vueillez entendre
Que c'est pour vous que ie meurs:
En mes yeux n'ha plus de pleurs,
Et mon cœur est ia transsi,
Vueillez en auoir merci.









Vous seulle estes ma fortune,
Qui va mon bien mesurant,
Si vous m'estes opportune,
Peu me chaut du demourant:
Sans vous ie vi en mourant,
Et m'est le iour obscurci,
Vueillez en auoir merci.

Si lon portoit la pensée
Au front, comme on fait les yeux,
M'amour seroit dispensée
De son office ennuyeux:
Par vous mesmes congnoistriez mieux
Mon trauail & mon souci,
Vueillez en auoir merci.









Au cœur des bestes sauuages
Rigueur loge proprement:
Mais sur les humains ouurages
Amour ha commandement:
Et toutesfois en tourment
Me tient le vostre endurci,
Vueillez en auoir merci.

Ce vous est peu de conqueste
D'aller ma fin poursuyuant,
Bien vous seroit plus honneste
Sauuer le vostre seruant:
Vn qui pourroit en viuant
Vostre nom rendre esclarci,
Vueillez en auoir merci.

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